Pfizer : théodicée de l’Occident I Par Modeste Schwartz

Après avoir (à vrai dire un peu tard : six mois après la publication du Que faire schwabien) consacré un volume à la pensée exotérique de Davos, je commence à présent (à nouveau un peu tard : tout est déjà en plein déroulement) à mieux cerner aussi le message ésotérique de la Grande Réinitialisation. Finalement, le « vaccin » (et/ou son échec, permettant ou non une perpétuation des « confinements ») n’est peut-être pas si secondaire que ça dans la construction du « Covid ».



Contradiction déjà relevée, marginalement, dans Le Magicien de Davos : tandis que le discours exotérique du Covid (reformulation des fables pour adolescents de la prophétesse underage Greta) recycle un panthéisme de centre commercial tournant autour d’une Gaïa féministe et végétarienne (après tout, Schwab est bien conscient de s’adresser avant tout à des femmes et à des invertis : à la Gauche), le « Covid ésotérique », lui, cultive beaucoup moins ce culte d’une nature à laquelle, on s’en doute bien, il ne manque qu’une goutte de téléologie (un « arrière-monde » à la Nietzsche) pour devenir la Création. Le Covid ésotérique, au contraire, compte bien remplacer le système immunitaire humain (dû à la nature, c’est-à-dire, qu’on le veuille ou non, à Dieu) par son hologramme « amélioré », tarifé et injectable, euphoriquement présenté par ses inventeurs comme un « système d’opération » du vivant. Une fois le réglage d’usine niqué, cette simulation sera-t-elle capable d’actualisations en temps réel aussi rapides que celles du vrai système immunitaire ? Vous pourriez être tentés de répondre : « qu’importe, du moment que les gens, comme des otages empoisonnés, dépendront pour leur survie de la prochaine injection, en termes de pouvoir du moins, Pfizer fonctionne. » Et c’est vrai. C’est vrai, mais c’est myope : ça explique le geste du prestidigitateur (tout comme le féminisme, l’ère du YIN, explique le gaïsme forestier de la variante exotérique), mais pas l’adhésion du public (et notamment de ces gouvernants visibles, qui devaient bien se douter que les masses, en cas d’injection de travers, risquent de leur provoquer des tempêtes cytokiniques à l’ancienne). Si la mise à jour de cette conspiration pas imaginaire du tout peut donc s’appuyer sur un travail de journalisme d’investigation, comme face à la version exotérique, la compréhension en profondeur du phénomène passera par une théorie de la culture. La voici, en deux mots : 

Le « Covid », c’est la culmination de l’Occident. L’Occident, c’est l’infini réputé connaissable et maîtrisable : le calcul infinitésimal, les taux d’intérêt négatifs, la physique quantique, la musique sérielle, le fucking love science. C’est la grotte de Platon, quoique réinterprétée, « traduite », d’une culture (l’Antique) qui ne connaissait pas l’infini et dont les mathématiques étaient strictement visuelles, d’abord vers une culture du zéro, de l’infini transcendant (la Chrétienne – que Spengler appelait, précautionneusement, « Arabe »), puis vers une culture (l’Occidentale) de l’infini immanentisé. L’Occident n’accède pas à l’infini par la prière, la transe, l’intuition (petite séquelle de pensée « arabe » traînant encore, parmi d’autres vieilleries, chez le pourtant très moderne Spinoza), mais par le laboratoire (à la fois atelier d’alchimiste et cabinet de curiosités renaissant) : l’endroit où je peux forcer l’infinité du cosmos à adopter mes dimensions minuscules, pour lui faire cracher le morceau, pour lui appliquer le troisième degré. Après quoi, il y a aura donc les « dieux » de Descartes, Harari et Laurent Alexandre, qui ont fréquenté le laboratoire, et les « inutiles », qui se contentent de vivre une existence humaine (c’est-à-dire antique, ou chrétienne). Et la vérité exotérique (celle qui doit, notamment, orienter le politique), c’est, comme dit Schwab, « l’opinion d’une majorité d’experts ». Non pas pour les raisons purement négatives (le dialogue préférable à la guerre, etc.) qu’énonçait encore le libéral ras-des-pâquerettes Habermas, mais bien en conséquence de la sotériologie occidentale. Car les « dieux » de Laurent Alexandre seront sauvés : l’immortalité des chairs, pas dans un au-delà eschatologique, mais à même ton loft du 16e arrondissement. Injectable. 

Evidemment, il y a, en réalité, très peu de raisons de penser que les bénéficiaires de la thérapie génique aujourd’hui vendue sous le nom de vaccin et sous chantage pseudo-épidémique vivront, en moyenne, une seule année de plus que les « inutiles » non-injectés. Vu l’âge de cette technologie (même si elle est probablement un peu plus ancienne que le récit covidien officiel n’oblige à le prétendre), il y a au moins une chose dont on peut être certain : aucun humain de 2021 ne vit depuis plus de dix ans (ou peut-être cinq ?) avec cette saloperie dans l’organisme. Et bien sûr, l’ennui, c’est qu’il existe encore moins de restrictions sur l’ouverture de nouveaux laboratoires (Raoult aussi a le sien) que sur la fondation de nouvelles religions. Le démenti est d’autant plus facile que le dogme se targue d’immanence. A force d’être fucking loved, la science devient vite une fille publique. D’où le besoin d’une main invisible oligarchique (un peu inquiétante, car non observable en laboratoire), pour s’assurer du contrôle du recrutement de ces « experts » dont la « majorité » définit le vrai. Et puis, finalement, le recours à une main beaucoup moins invisible (celle de la contrainte étatique, le doigt sur le canon à flashball), quand le consensus démocratique autour des vertus de cette main invisible commence à s’effriter. Comment les hilferdingiens finissent toujours par être les Monsieur Jourdain du léninisme : j’ai exposé tout cela dans Le Magicien de Davos, je n’y reviendrai donc pas ici. 

Mais (pour reprendre une vieille blague sur l’adultère) : « qui vas-tu croire ? Ce que je te raconte, ou tes yeux ? » Prouve que toi aussi, tu fucking love science, en tendant le bras à la seringue de « l’opinion d’une majorité des experts ». N’oublions pas les mythes fondateurs de l’Occident, à commencer par le mythe copernicien (tiens, tiens : un polonais…). Rappelons que, sur Terre, la dynamique stellaire exacte de la Terre et du Soleil change assez peu de choses au calendrier des moissons (ou même à la navigation en mer), tout comme les « inutiles » non-injectés pourraient bien, en fin de compte, vivre plus longtemps que les « dieux » de marque Pfizer. Mais avoir « découvert » (comprendre : « fait sortir de la grotte ») que c’est la Terre qui tourne, c’est un pro-grès, une avancée-vers. Un progrès vers quoi ? Vers le vaccin Pfizer. C’est pourquoi – quelle qu’en soit la réalité vérifiable – l’alunissage était, lui aussi, si absolument nécessaire à la culture occidentale (aussi bien dans sa version « tronc commun » américaine, que Debord disait « diffuse », que dans sa version singée, émulée, « concentrée », schizophrène, du monde pravoslave passé sous la coupe des sectaire du faux-prophète Marx) : parce que lorsque (ou si) il a eu lieu, pour la première fois dans l’histoire de l’humanité, la camelote copernicienne a (d’un point de vue antique) servi à quelque-chose. Servi à quelque-chose qui ne sert à rien. C’est ce qu’on pourrait appeler une utilité esthétique. 

Car enfin, il faut arrêter de se dorer la pilule : le Covid, ça a commencé au bas Moyen-âge. Toutes ces générations d’« émancipés », crevant avec, pour tout viatique, en guise d’Ersatz de promesse du salut, l’espoir que « leurs enfants auraient une vie meilleure », ça veut dire quoi ? C’est quoi, une « vie meilleure » ? Pour l’esclave, la femme, l’enfant attardé, c’est une vie, comme dit Schwab, « plus verte et plus inclusive » : un monde imaginaire où l’icône du steak synthétique permet à l’herbivore un peu con de se faire des illusions sur sa place exacte dans la chaîne trophique (Bill Gates, au passage, ne s’en cache pas : il adore les hamburgers). Mais pour l’homme ? La « vie meilleure » de ces enfants enviés ne pouvait, de toute évidence, être meilleure que par sa plus grande proximité chronologique avec le « vaccin » Pfizer. Pour leurs auteurs conscients, les révolutions britanniques, celles de 1789, de 1848 et de 1917, ce sont des restructurations en vue de l’organisation du laboratoire mondial. C’est l’avant-Pfizer.

C’est pourquoi, sous l’épais ridicule de ses outrances rhétoriques habituelles, le bon mot d’hier du Gypsy King de Budapest (qui a comparé les prouesses vaccinales de la Hongrie à l’héroïsme des révolutionnaires hongrois de 1848) n’est finalement pas si dénué de sens. Certes, les troupes révolutionnaires hongroises de 1848 continuaient avant tout la quête d’émancipation nationale socialement réactionnaire du mouvement Kouroutz (écrasé par l’Autrichien moins d’un siècle et demi plus tôt) ; mais leurs leaders maçons progressistes, autour de Kossuth et de Széchennyi, eux, se battaient effectivement pour qu’un jour les fiers magyars puissent eux aussi servir de cobayes à l’industrie pharmaco-chimique américano-israélienne. En ce sens, Orbán parfait effectivement l’œuvre de Kossuth, au service du progressisme et de la gauche. Le fait que la nation hongroise risque de succomber à l’opération (un million et demi de « vaccinés » sur dix millions de citoyens au moment où j’écris – et la dette d’État la plus importante depuis la thérapie de choc des années 1990) est, de ce point de vue, parfaitement secondaire.

Modeste Schwartz
Mars 2021.

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