Dans son livre, Stuart Ewen explique qu'au début du XXe siècle, le capitalisme a souffert d'une crise de surproduction, à laquelle les industriels américains ont décidé de répondre en créant de nouveaux besoins grâce à diverses techniques de vente (ce que nous appelons aujourd'hui le marketing). Le passage du concept économique de limitation des besoins et des ressources à celui de consommation à outrance, avec en parallèle la normalisation voire la banalisation du crédit et de l'endettement et la promotion du concept de « plaisir », a donné naissance, de manière artificielle, à la société dite « de consommation ».
Le 13 juillet 1965, les femmes en France ont obtenu le droit de travailler, d'ouvrir un compte bancaire sans l'accord de leur mari et donc d'accéder au marché de la consommation. La question se pose : le législateur français a-t-il agi sous l'influence des industriels qui voulaient se débarrasser des excès ? Stuart Owen démontre que c'est exactement ce qui s'est passé aux États-Unis. La société américaine est une société d'immigrants qui ont « apporté » aux États-Unis leur propre modèle culturel, basé sur un système patriarcal (c'est-à-dire en même temps un modèle de réalisme économique). La société de consommation émergente a dû briser le système traditionnel et pousser 50 % de ses citoyens sur le marché du travail et donc sur le marché de la consommation. Selon Lucien Cerise, cet objectif a été atteint grâce à l'utilisation de techniques de piratage psychosociales, basées sur la motivation dérivée de la promesse d'obtenir du plaisir. La motivation par le désir s'étant avérée plus efficace que la motivation par la répression, la société, au lieu du proverbial bâton, devait désormais recevoir une carotte. Ewen soutient dans son livre que l'économie capitaliste, comme l'économie communiste, est une économie planifiée : dans les années 1920, le gouvernement américain a décidé de créer un modèle alternatif au modèle communiste qui avait émergé à l'Est - destiné au « prolétariat » américain - un modèle consumériste qui, dans sa phase ascendante, a favorisé l'addiction, la gloutonnerie et la débauche en tout genre. Aujourd'hui, le capitalisme entre dans une phase de décomposition qui va progressivement contraindre les citoyens à réduire leur consommation et à quitter le modèle de la « société de consommation » - bien entendu, cela se fera encore avec les outils de l'ingénierie sociale, notamment la fabrication du consentement.